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Les derniers mots de Léon Brunschvicg

Les derniers mots de Léon Brunschvicg

Excellent article portant sur le dernier livre de Brunschvicg, terminé  deux mois avant sa mort survenue en janvier 1944

»Héritage de mots, héritage d’idées «

http://classiques.uqac.ca/classiques/brunschvicg_leon/heritage_de_mots_idees/heritage_de_mots.html

»La confusion du langage menace de rendre irrémédiable le désordre des idées. » Selon Brunschvicg, les mots les plus familiers charrient des significations tellement divergentes que leur usage demeure obscur tant qu’on n’a pas « entrepris de déballer la cargaison […] enveloppée dans les plis du langage ». Plutôt que de s’incliner devant le pouvoir magique des mots, il faut « se transporter à l’intérieur de l’idée » et préférer aux antithèses superficielles (amour/haine, liberté/nécessité, etc.) des oppositions plus profondes. Le livre déclinera les six exemples choisis par Brunschvicg : raison, expérience, liberté, amour, Dieu et âme. »

Ludovic Robberechts : essai sur la philosophie réflexive

Tome 1 ( Maine de Biran, Lachélier, Lagneau, Brunschvicg):

https://books.google.fr/books?id=g28op-b6IsEC&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

 

Tome 2 ( Jean Nabert et après):

https://books.google.fr/books?id=sOn_tLn5yTsC&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

 

un ancien article là dessus:

http://principiatoposophica.blogg.org/ludovic-robberechts-essai-sur-la-philosophie-reflexive-a116603774

 

 

 

Premier contact (2016) : les humains, comme les toxicomanes chez Ernst Junger portent La Croix du temps!

le film peut être vu ici en vf :

https://m.ok.ru/video/216015440503

Cet article de l’an dernier à son sujet:

Premier contact (Arrival) 2016: excellent et important!

 

En fait ce que les extraterrestres apportent à l’humanité par l’intermédiaire de leur langage à base de glyphes sur le modèle des anciens hiéroglyphes égyptiens , c’est une compréhension nouvelle, non linéaire, du temps « dont nous sommes tellement  esclaves » comme Louise le note au début du film.

ceci rappelle le propos de Léon Brunschvicg :

quelques citations éparses de Brunschvicg particulièrement éclairantes, voire illuminatrices

« Nous nous affranchirons du temps simplement vital, dans la mesure où nous en découvrirons la racine intemporelle. La vie, nous savons trop qu’elle est sans pitié pour les vivants. Elle peut se définir comme l’ensemble des forces qui résistent à la mort….. jusqu’à l’inévitable dénouement qui la révèle comme l’ensemble des forces qui acheminent à la mort…..

…il est malaisé de décider si l’armée des vivants peut avoir l’espérance, suivant la magnifique image que nous a proposée Bergson, de « culbuter la mort« ; mais, puisque le salut est en nous, n’est il pas assuré que l’armée des esprits débouche dans l’éternité, pourvu que nous ayons soin de maintenir à la notion d’éternité sa stricte signification d’immanence radicale ? »

 

et il oppose au temps vital de la dégradation    et du vieillissement incessant  le temps spirituel du redressement continu et de l’accumulation de vérités positives qui se confond avec l’esprit même :

Léon Brunschvicg : temps biologique et temps spirituel

« le propre de l’esprit est de s’apparaitre à lui même dans la certitude d’une lumière croissante, tandis que la vie est essentiellement menace et ambiguïté. Ce qui la définit c’est la succession fatale de la génération et de la corruption. Voilà pourquoi les religions, établies sur le plan vital, ont beau condamner le manichéisme, il demeure à la base de leur représentation dogmatique… ce qui est constitutif de l’esprit est l’unité d’un progrès par l’accumulation unilinéaire de vérités toujours positives«

 

Il y a donc deux plans en dualité et en opposition : plan vital des corps et des âmes,  de la mort et de l’entropie ou monde, plan internel de l’esprit qui est le « royaume des cieux » dont parle l’evangile.

Seulement l’ambiguité du film, comme je le notais après l’avoir découvert au cinéma, se situe dans l’opposition entre langage et science qui est celle que signale sans cesse Brunschvicg entre Verbe- raison et Verbe- langage, dualité qui remonte aux Stoïciens,   par exemple:

http://classiques.uqac.ca/classiques/brunschvicg_leon/progres_conscience_t1/progres_conscience_t1_intro.html

« Aussi bien, et l’on devra s’en laisser convaincre par les premiers chapitres de notre ouvrage, l’opposition décisive entre l’idéalisme mathématique de la République platonicienne et le réalisme astro-biologique de la Métaphysique aristotélicienne a défini le thème fondamental de l’Occident dans le domaine pratique comme dans le domaine théorique, indépendamment de toute référence au christianisme. Plusieurs siècles avant qu’il ait commencé d’exercer sa propagande, la polémique de l’Académie et du Lycée apporte le témoignage lumineux qu’il existe deux types radicalement distincts de structure mentale, commandés, l’un par les relations de la science (μαθήματα), l’autre par les concepts du discours (λόγοι). De là procède le problème religieux, tel qu’il se manifeste dans la terminologie des Stoïciens avec la dualité du Verbe intérieur, ou raison : λόγος ἐνδιάθετος, et du Verbe extérieur, ou langage : λόγος προφορικός. Ce problème, s’il devait prendre dans le christianisme une forme de plus en plus aiguë, ne relève à son origine que de la seule philosophie. »

or c’est l’avenement de la Science , notamment de la physique mathématique, au 17 eme siècle européen, qui ouvre la voie à une autre compréhension du temps, d’un autre temps donc, non plus vital, orienté vers la mort, mais spirituel, lié non plus au monde mais au plan de l’esprit .

Dans La film, c’est le physicien Ian Donelly qui porte cette compréhension, c’est lui qui affirme au début, dans l’hélicoptère,  « que c’est la Science, et non le langage, qui a amené la civilisation »

le film oppose ainsi Louise à Ian, langage et science, cependant ils tomberont amoureux et auront un enfant mais Ian partira et leur enfant mourra du cancer.

J’avais tort de considérer que les glyphes des octopodes extra-terrestres sont une science , pas de science hors des mathématiques qui sont la science transcendantale, ces signes sont bien un langage, non une mathématique,  et c’est la position du réalisateur du film de donner la prédominance au Verbe – langage sur la science , sur le verbe- Raison qui seul est universel, propre à unifier les peuples, qui ont chacun un langage différent. Cette  erreur du scénario, reposant sur une mécompréhension de ce qu’est réellement la science, confondue à tort avec les postures scientistes, est tragique : car seule la science peut unifier l’humanité , car elle seule est universelle et peut aider l’être Humain à vaincre la malédiction , le fardeau insupportable du Temps, qui est La Croix qu’il porte,  grâce à une nouvelle compréhension de celu ci.